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L’amour est la conséquence du pardon authentique

P. Thomas Rosica

mercredi 12 juin 2013

Jesus-anointed-by-woman-croppedRéflexion biblique pour le 11e dimanche du temps ordinaire C
Dans les évangiles, Jésus mange très souvent avec les pécheurs et saisi l’opportunité pour partager de très importantes leçons sur le fait d’être disciple et sur la sainteté. Comme pour maintes actions qu’il accomplissait, les relations amicales de Jésus avec de telles gens et ses repas avec eux énervaient ses adversaires, notamment les chefs religieux de son temps. Ils murmuraient contre lui : « Il est entré en tant qu’invité chez un pécheur », ou alors « Regardez-le manger avec les collecteurs d’impôts et les prostituées ! » Mais là où les autres ne voyaient que des pécheurs, des gens en marge de la société, des parias qui méritaient d’être haïs et isolés, Jésus voyait des humains qui se recroquevillaient dans l’ombre, souvent piégés dans leurs propres échecs, qui tentaient désespérément de réparer leurs torts, et qui essayaient maladroitement de faire amende honorable pour une vie d’injustice.
C’était surtout lors des repas que Jésus semblait montrer de manière explicite qu’il réconciliait les pécheurs. Comment pourrait-on ne pas se rappeler les histoires de Zachée, Lévi, la femme qui lava les pieds de Jésus avec ses larmes, les disciples désenchantés à Emmaüs, et Pierre sur la rive du lac ? Même la cène à laquelle nous songeons instinctivement en tant qu’occasion sublime était un repas partagé avec des pécheurs. La table de Jésus inclut Judas (qui le trahi), Pierre (qui l’a renié), et les disciples obtus qui se chamaillaient. L’Église primitive fondait son interprétation de l’eucharistie sur la base de la mémoire dangereuse de son entourage lors de la cène.
La dame qui s’invite à toutes les fêtes
Dans la parabole de l’évangile de ce dimanche au sujet du pardon de la pécheresse [Luc 7, 36-50], un Pharisien, soupçonnant que Jésus était prophète, l’invite au banquet festif dans sa demeure ; mais la prétendue vertu du Pharisien conduit à un pardon minime de la part de Dieu et, par conséquent, en peu d’amour apparent envers Jésus. La pécheresse, par contre, manifeste une foi en Dieu qui l’a menée à rechercher la miséricorde pour ces péchés, et c’est par ce que de nombreux gestes ont été pardonnées, qu’elle exprime manifestement son amour intense pour Jésus. L’épisode dans sa totalité constitue une leçon puissante sur la relation entre le pardon et l’amour.
Pourquoi cette femme inconnue s’approcha-t-elle de Jésus et l’a oint en s’exposant au risque d’être ridiculisée et abusée par autrui ? Son action avait le leitmotiv suivant : son amour pour Jésus et sa gratitude pour la miséricorde de ce dernier. Elle s’est comportée à l’opposé de ce que ferait une femme juive en public : elle défait ses cheveux et oint Jésus avec ses larmes. Elle a aussi accompli une action que seul l’amour peut faire : elle prit l’objet le plus précieux qu’elle possédait et le dépensa en l’honneur de Jésus. Son amour n’était pas calculé, mais plutôt débordant et extravagant.
Jésus raconte ce qu’il a vu des actions de cette femme [v. 44-46]. La finalité de ce récit n’est pas d’accuser Simon pour ce qu’il n’a pas fait. Simon persiste-t-il à percevoir la femme en tant que pécheresse, ou est-il capable de réinterpréter les actions de cette dernière ? Si Simon n’est pas capable d’en déduire une évaluation différente pour expliquer ce qu’il a vu, Jésus essaye de lui faire voir ce qu’il y voit : elle a été pardonnée pour beaucoup d’actions et exprime désormais un amour immense [v.47-48].
Cette femme n’a pas été pardonnée grâce à ses manifestations fastueuses d’amour ; ce sont plutôt ces actions d’amour qui résultent de son expérience d’être pardonnée. Le verset 47 résume parfaitement le fond de l’histoire : « si ses péchés, ses nombreux péchés, sont pardonnés, c’est à cause de son grand amour. » Son amour est la conséquence de son pardon. C’est une autre des choses à tirer de cette parabole de Luc [7, 41-43].
L’amour voile une multitude de péchés
Notre amour est-il extravagant ou misérable ? Jésus explique clairement que le grand amour émane d’un cœur pardonné et purifié. « L’amour couvre la multitude des péchés » [1 Pierre 4, 8], « car l’amour est de Dieu » [1 Jean 4, 7]. L’amour fastueusement exprimé par la femme pécheresse était une preuve qu’elle avait trouvé la grâce aux yeux de Dieu. Le fort contraste des attitudes entre Simon et la femme de mauvaise renommée, nous démontre comment nous pouvons ou accepter ou rejeter la miséricorde de Dieu. Simon, qui se considérait un honnête Pharisien, n’a point senti un besoin d’amour ni de miséricorde. Son autosuffisance l’empêchait de reconnaître son besoin de la grâce de Dieu.
La pécheresse incarne une personne qui répond proprement à Jésus, et dont les actions miroitent les siennes. La question principale que pose son histoire, s’adresserait à Simon et aussi à nous, « Voyez-vous cette femme ? » Mal juger  cette femme et ses actions c’est ne pas voir Jésus et saisir son identité de manière correcte. L’histoire est ouverte : il y a encore l’espoir que la perception, la compréhension et la vision de Simon puissent être corrigées. Qu’en est-il des nôtres?
Réconciliation chrétienne
L’évangile de ce dimanche nous invite à réfléchir sur le mystère et l’obligation du pardon et de la réconciliation dans notre tradition chrétienne. Il existe une acception erronée et répandue qu’un chrétien devrait être un artisan de paix impartial qui essaye d’induire une réconciliation entre des forces antagonistes. Ceci fait de la réconciliation un principe qui doit être appliqué dans tous les cas de conflits. Dans certains conflits un parti a raison tandis que l’autre est fautif, l’un est juste et victime alors que l’autre suggère l’injustice et l’oppression. En tant que chrétiens, il ne nous est jamais requis de réconcilier le bien avec le mal, la justice avec l’injustice. Nous devons plutôt éliminer le mal, l’injustice et le péché.
Deuxièmement, la neutralité n’est pas toujours possible, et dans des cas conflictuels dus à l’injustice et à l’oppression, la neutralité est totalement impossible. Si nous ne prenons pas parti avec les opprimés, nous finissons par être du côté de l’oppresseur. Dans des cas pareils, ‘le rapprochement des deux partis’ pourrait engendrer un résultat bénéfique pour l’oppresseur, car il permet de maintenir le status quo; il voile la vraie nature du conflit, garde la personne opprimée dans le silence et la passivité, et entraîne une sorte de fausse réconciliation dépourvue de justice. L’injustice continue et tout le monde est appelé à sentir que l’injustice n’est pas importante car la tension et le conflit ont été amoindris.
Troisièmement, il existe un point de vue commun selon lequel les chrétiens doivent toujours rechercher une « via media » pour résoudre chaque litige. Ceux et celles qui ont peur du conflit ou de la confrontation, même non-violents, sont habituellement convaincus du besoin de changement. Leur prudence cache un pessimisme antichrétien concernant le futur, un manque d’espérance chrétienne authentique. D’autre part ils utilisent le souci de la réconciliation pour justifier une forme d’évasion des réalités de l’injustice et du conflit.
Le pardon dans la crise des abus sexuels
Ce sujet a été adressé au bon moment si l’on prend en considération la crise, voire, la pandémie des abus sexuels qui a atteint l’Église de manière très profonde. Depuis les quelques mois passés, le monde entier est au courant des péchés et des échecs des chefs pastoraux. J’attire votre attention à la toute récente et excellente lettre pastorale (en anglais) de Mgr Mark Coleridge, du diocèse de Canberra et Goulburn en Australie. Dans sa lettre pour la Pentecôte  2010 qui porte sur les abus sexuel des jeunes dans l’Église catholique, intitulée « Seeing the Faces, Hearing the Voices, » (« Voir les visages, entendre les voix, ») Mgr Coleridge écrit :
Un autre facteur était la culture de pardon de l’Église catholique qui tend à percevoir les choses en terme de péché et de pardon plutôt que de crime et de châtiment. Mais dans le cas des abus des jeunes par le clergé, nous avons affaire avec le crime, et l’Église a lutté pour trouver le point de convergence entre le péché et le pardon d’une part et entre le crime et le châtiment d’un autre part. Il est vrai, le péché doit être pardonné, mais le crime doit être puni aussi. La miséricorde et la justice doivent suivre leurs cours, et ceci de manière convergente. Ceci est lié aux questions de plus grande envergure qui concernent la manière dont l’Église perçoit sa relation avec la société de manière plus générale. Nous sommes « dans le monde, et non pas du monde » : mais qu’est-ce que cela signifie aujourd’hui et maintenant ? Il y a aussi la grande question de la relation entre le jugement divin et l’humain. L’Église insiste que c’est à Dieu, et non pas aux êtres humains, qu’appartient le jugement dernier. Toutefois, comment ce concept répond-t-il au besoin du jugement humain lorsque nous nous aventurons au sein du chemin du crime et du châtiment ? Nous avons été paresseux et maladroits, même parfois coupables, dans la formalisation de nos réponses à de telles questions.
Je vous encourage à lire la lettre intégrale que vous trouverez au site web du diocèse de Canberra et Golbourn. (en anglais)
De telles erreurs sur la réconciliation chrétienne ne sont pas simplement une affaire de malentendus, mais résultent d’une carence de vrai amour et de compassion pour ceux qui souffrent, qui ont été victimaires, ou d’un manque d’appréciation de ce qui se passe réellement dans des conflits sérieux. La poursuite d’une neutralité illusoire dans chaque conflit est ultimement une manière de sympathiser avec l’oppresseur. Ce n’est pas la réconciliation et l’absolution que Jésus apprenait tout au long de sa vie et de son ministère.
Dans le conflit entre les Pharisiens et ceux qu’on appelés ‘pécheurs’ Jésus prenait parti pour les pécheurs, les prostituées, les collecteurs de taxes et les Pharisiens. Et dans le conflit entre le riche et le pauvre il prit parti pour le pauvre. Jésus condamne les Pharisiens et le riche avec certitude, pardonne les pécheurs et bénit les pauvres. Jésus n’entreprend aucune tentative de compromis avec les autorités pour une paix, une réconciliation ou une unité erronées. La réconciliation, la paix et le pardon que Dieu exige se fondent sur la vérité, la justice et l’amour.
« Paroles faites chair, volume 3, année C » sera publié par la Conférence des Evêques catholiques du Canada dans le courant de l’année 2013.  Il est toujours possible de commander votre exemplaire de « Paroles faites chair, volume 2, année B », pour cela visitez notre boutique sur le site seletlumieretv.org/boutique. Pour recevoir le recueil de l’année C, veuillez-vous inscrire sur notre lettre d’infos qui vous annoncera la sortie de ces réflexions sur l’Année C. seletlumieretv.org/sabonner
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