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Magnifying Glass

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« Je vais ouvrir vos tombeaux, et je vous en ferai sortir. »

P. Thomas Rosica

Monday, March 27, 2017

Cinquième dimanche du Carême, Année A - 2 avril 2017
Ézéchiel 37,12-14
Romains 8,8-11
Jean 11,1-45
La vision dramatique d’Ézéchiel et la nôtre
La première lecture d’aujourd’hui, tirée d’Ézéchiel 37, 12-14, est la grande vision de la vallée des ossements desséchés, l’un des tableaux les plus spectaculaires de toute la littérature biblique. En voici le contexte historique : elle remonte au début du sixième siècle avant Jésus Christ, quand la main du Seigneur vint sur Ézéchiel alors que les Juifs étaient en captivité à Babylone. Depuis environ 150 ans, la situation politique du peuple juif déclinait. Le point tournant survint en 587 avant J.C. avec la catastrophe finale de la défaite et le début du grand exil du peuple juif, désespéré et impuissant face au sort qui s’abattait sur lui. C’est dans le cadre de ces événements que se déploie la vision dramatique d’Ézéchiel : on y voit les ossements blanchis d’une armée que les oiseaux de proie ont fini de décharner. Incroyable champ de batille, couvert de cadavres laissés à l’abandon ! Imaginez l’odeur de mort et de putréfaction !
Réticent, le prophète Ézéchiel reçoit de Dieu l’ordre de prophétiser sur ces ossements, de les ramener à la vie. Avec le secours d’un puissant tremblement de terre, les os se rejoignent l’un à l’autre dans une immense rumeur. Les tendons se reconnectent, la chair puis la peau viennent revêtir les cadavres. Le souffle, « ruah », l’Esprit de Dieu vient des quatre extrémités de la terre et les corps flasques « reprennent vie, se dressent sur leurs pieds – c’est une immense armée ». Alors qu’aujourd’hui, nous voyons dans cette scène la préfiguration de la résurrection des morts, les Juifs du temps d’Ézéchiel ne croyaient pas à une telle conception de l’au-delà. Pour eux, l’immense armée ressuscitée représentait l’ensemble du peuple juif : les survivants du royaume du Nord qui avaient cherché refuge en Assyrie, les paysans qui étaient encore sur place et les exilés de Babylone. Ils allaient se regrouper, former de nouveau un peuple, habiter leur propre pays, et ils sauraient dorénavant que c’était là l’œuvre du seul vrai Dieu.
Au fil des siècles, les chrétiens ont proclamé ce texte pendant la liturgie de la nuit pascale en accueillant de nouveaux membres dans l’Église. Le témoignage puissant d’Ézéchiel offre une image bouleversante de la force de régénération, de restauration et de renouveau du Dieu d’Israël, en cette vie et pour toute l’éternité. À travers les siècles, les croyantes et les croyants au Dieu et Père d’Abraham, d’Isaac et de Jésus ont repris courage grâce à la vision d’Ézéchiel; c’est que nous croyons qu’elle raconte aussi notre histoire à nous. Nous croyons en la puissance du pardon de Dieu, en la capacité du Christ et de la tradition catholique de nous redonner la vie et de nous conduire à la vie alors même que tout autour de nous semble annoncer la nuit, les ténèbres, la mort, la dissolution et le désespoir.
La vie chrétienne est un défi constant
Nous apprenons, écrit saint Paul à la communauté de Rome (8, 8-11), que par la croix de Jésus Christ Dieu a brisé le pouvoir du péché et prononcé sur lui le jugement (v. 3). Les chrétiens n’échappent pas à la chair mais celle-ci est devenue étrangère à leur être nouveau, qui est la vie dans l’esprit : moi nouveau gouverné par l’Esprit Saint. Sous la direction de l’Esprit Saint, les chrétiens peuvent accomplir la volonté divine, qui s’exprimait jusque-là dans la loi (Romains 8,4). Le même Esprit qui redonne vie aux chrétiens pour la sainteté ressuscitera aussi leur corps au dernier jour (v. 11) La vie chrétienne est donc l’expérience d’un défi constant car il s’agit de tuer les désordres du corps grâce à la vie de l’esprit (v. 13).
Le don que fait Jésus de la vie entraîne sa propre mort
Texte riche en émotions que l’Évangile d’aujourd’hui. La résurrection de Lazare, le récit le plus long de tout l’Évangile de Jean (11, 1-44) en dehors du texte de la passion, représente le point culminant des signes de Jésus. L’épisode se situe peu avant que Jésus ne soit capturé, jugé et crucifié. C’est l’événement qui influence le plus directement sa condamnation par ceux qui cherchent à le tuer. L’ironie johannique souligne que c’est le don que fait Jésus de la vie qui entraîne sa propre mort. Jésus savait que son ami Lazare était malade mais il n’est pas venu faire de guérison. En fait, il a attendu plusieurs jours après la mort de Lazare; entre-temps il donnait à ses disciples un enseignement sur la lumière – doctrine incompréhensible devant la maladie grave et la mort mais qui prend tout son sens à la lumière de la résurrection de Lazare et de celle du Christ.
Jésus déclare à Marthe : « Je suis la résurrection et la vie; celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra » (v. 25). Et il ajoute : « Crois-tu cela ? » (v. 26) Le Seigneur nous presse de répondre, comme l’a fait Marthe : « Oui, Seigneur, nous aussi, nous croyons, malgré nos doutes et nos ténèbres; nous croyons en toi, parce que tu as les paroles de la vie éternelle; nous voulons croire en toi, qui nous donnes une espérance crédible en la vie après la vie, en une vie pleine et authentique dans ton royaume de lumière et de paix. »
Seigneur, si seulement tu avais été là …
Combien de fois, comme Marthe et Marie, nous avons murmuré ces mêmes paroles de douleur et de désespoir : Seigneur, si seulement tu avais été là (v. 32), mon frère… ma sœur, ma mère, mon père ou mon ami ne serait pas mort. » Mais le récit débordant d’émotions de l’Évangile de Jean nous dit quel Dieu nous avons… un Dieu « bouleversé d’une émotion profonde ». Le mot grec employé ici pour décrire la réaction instinctive de Jésus, au verset 33, signifie qu’il a la gorge serrée. C’est une expression étonnante en grec qui se traduit littéralement : « il râle, il grogne en esprit », peut-être de colère en présence du mal (la mort). Nous voyons le Seigneur pleurer au tombeau de son ami Lazare; un Sauveur profondément ému de voir la douleur et le deuil de tant d’amis de Marthe, de Marie et de Lazare. La phrase la plus courte de toute la Bible se trouve dans ce passage : alors Jésus pleura (v. 35).
Jésus nous révèle un Dieu qui fait un avec nous dans la souffrance, le deuil et la mort… un Dieu qui pleure avec nous. Dieu n’intervient pas pour prévenir les tragédies et les souffrances de la vie. Si nous avions un dieu parachuté, sorte de « deus ex machina » survenant au dernier moment pour empêcher la tragédie et le péché, la religion et la foi ne seraient plus qu’une sorte de magie ou de fatalité et nous ne serions que des pions sans ressources sur l’échiquier d’un dieu capricieux. Où est Dieu au milieu des tragédies humaines ? Dieu est là, en plein dedans, et il pleure. C’est notre Dieu, profondément, humainement solidaire, qui dans la gloire de l’Incarnation embrasse totalement notre condition humaine.
La mort du cœur et de l’esprit
Le récit de la résurrection de Lazare nous parle aussi d’un autre genre de mort. Nous pouvons être morts même avant de mourir, alors que nous sommes encore en cette vie. Je ne parle pas ici de la mort de l’âme causée par le péché mais plutôt d’une mort qui prend la forme d’une absence d’énergie, d’espoir, d’envie de se battre et de continuer à vivre. Nous qualifions souvent cette réalité de mort du cœur ou de mort spirituelle. Bien des gens sont enchaînés par cette sorte de mort, jour après jour, à cause des circonstances tragiques et affligeantes de leur vie. Qui pourra jamais renverser cette situation et nous rappeler à la vie, nous redonner l’énergie, nous libérer des tombeaux qui nous enchaînent ? Qui pourra opérer cette réanimation cardio-respiratoire et nous arracher au désespoir ?
Pour certaines afflictions, il n’existe pas de remède humain. Les paroles d’encouragement échouent très souvent à provoquer le moindre changement. Dans bien des cas, les personnes qui se retrouvent dans cet état sont incapables de faire quoi que ce soit; elles ne peuvent même pas prier. Elles sont comme Lazare au tombeau. Il faut que d’autres fassent quelque chose pour elles. Jésus dit un jour à ses disciples : « guérissez les malades, ressuscitez les morts » (Matthieu 10,8). Les sept œuvres de miséricorde corporelle consistent à nourrir les affamés, donner à boire aux assoiffés, vêtir les dénudés, héberger les sans-logis, visiter les prisonniers, visiter les malades et ensevelir les morts. Mais l’Évangile d’aujourd’hui nous dit qu’il nous faut, en plus, « ressusciter les morts ».
Seul celui qui a pénétré dans le royaume de la mort pour affronter la mort elle-même en combat singulier peut donner la vie à ceux qui sont morts. En racontant la résurrection de Lazare, Jean en fait un signe qui transforme la tragédie en espérance. La maladie et la mort de Lazare sont pour la gloire de Dieu l’occasion de se manifester. Comme chrétiens, nous ne nous attendons pas à échapper à la mort; mais nous l’approchons avec la foi en la résurrection.
Les conséquences de la foi en la résurrection
Faisant allusion à l’histoire de Lazare dans son Message du Carême 2011, le pape Benoît a écrit :
Lorsque l’évangile du cinquième dimanche proclame la résurrection de Lazare, nous nous trouvons face au mystère ultime de notre existence: « Je suis la résurrection et la vie... le crois-tu ? » (Jean 11, 25-26). A la suite de Marthe, le temps est venu pour la communauté chrétienne de placer, à nouveau et en conscience, toute son espérance en Jésus de Nazareth: « Oui Seigneur, je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu, qui vient dans le monde » (v.27).
La communion avec le Christ, en cette vie, nous prépare à franchir l’obstacle de la mort pour vivre éternellement en Lui. La foi en la résurrection des morts et l’espérance en la vie éternelle ouvrent notre intelligence au sens ultime de notre existence: Dieu a créé l’homme pour la résurrection et la vie; cette vérité confère une dimension authentique et définitive à l’histoire humaine, à l’existence personnelle, à la vie sociale, à la culture, à la politique, à l’économie. Privé de la lumière de la foi, l’univers entier périt, prisonnier d’un sépulcre sans avenir ni espérance.
Vivre le Carême cette semaine
1. C’est immédiatement avant sa propre mort et résurrection que Jésus proclame les paroles qui sont au cœur de l’Évangile d’aujourd’hui : « Je suis la résurrection et la vie » (Jean 11, 25). Un évêque du quatrième siècle, Grégoire de Nazianze (328-389), commentait ainsi le miracle de Béthanie qui préfigure la mort et la résurrection de Jésus. Méditez sur ces paroles touchantes de saint Grégoire.
Il prie mais il entend la prière. Il pleure mais il sèche les larmes.
Il demande où on a déposé Lazare parce qu’il était un être humain;
et il ressuscite Lazare parce qu’Il est Dieu.
Tel un agneau, il est conduit à l’abattoir,
mais il est le Pasteur d’Israël et maintenant du monde entier.
Il est meurtri et blessé,
mais il guérit toutes les maladies et les infirmités.
Il est dressé, cloué au bois de l’arbre,
mais par l’arbre de vie il nous restaure…
Il donne sa vie,
mais il a le pouvoir de la reprendre;
et le voile se déchire, car les portes mystérieuses du paradis se sont ouvertes;
et les rochers se fendent et les morts se relèvent.
Il meurt mais il donne la vie, et sa mort détruit la mort.
Il est enseveli mais il ressuscite.
2. Regardez autour de vous et trouvez une ou deux personnes aux prises avec la mort, en particulier la mort du cœur et de l’esprit, des gens qui ont perdu la volonté et le goût de vivre par suite des épreuves qu’elles ont subies. Allez à elles, et que votre parole ranime leur esprit, réveille leur âme, brise leurs liens et les libère.


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