La semaine dernière, nous avons été témoins de la puissance divine agissant sur les forces de la nature (Marc 4, 37-41). Aujourd’hui, les récits de l’Évangile en ce 13e dimanche du temps ordinaire, nous révèlent son autorité envers le mal et la mort. Dans ces récits forts, Jésus nous rappelle de l’importance de la foi. Rien n’est possible sans la foi. En se rendant à la maison de Jaïre (Marc 5), Jésus est confronté à des pannes, des délais et même des obstacles sur la route. Les personnages de Marc (5) transmettent leur impureté à Jésus et à chacun, Jésus leur accorde la plénitude de Dieu qui purifie. Prenons un moment pour revoir chaque situation.
La femme souffrante d’hémorragies
La guérison miraculeuse, par Jésus, de cette femme qui souffrait d’hémorragies depuis douze ans est décrite dans trois des quatre Évangiles (Mt 9, 20-22; Mc 5, 25-34; Lc 8, 43-48). Selon la loi juive, trois formes d’impuretés étaient assez graves pour valoir l’exclusion sociale : la lèpre, les souillures causées par des écoulements corporels et les impuretés au contact d’un mort (Nb 5, 2-4). Dans l’Évangile selon Marc (verset 5), la femme était affligée d’une maladie qui la rendait rituellement impure (Lévitique 15, 25-27), ce qui l’aurait exclue de contacts sociaux et de la pratique religieuse au temple. Elle souhaitait désespérément la guérison par Jésus, mais elle savait que d’après la loi juive, il serait ainsi rituellement impur au contact de son sang.
Tous ceux qui souffraient d’une des maladies devenaient impurs. Toute chose ou personne touchée par le malade devenait impure. Tous ceux qui étaient impurs souffraient également d’une séparation avec les autres et avec Dieu. Toute chose impure était inapte ou indigne de la présence d’un Dieu qui était saint. Ceux que l’on jugeait impurs devaient se soumettre à un rite de purification ou d’épuration afin d’être accueillis à nouveau en société et dans la présence de Dieu.
La femme s’impose audacieusement dans l’espace personnel de Jésus et touche ses vêtements. Ce geste rend Jésus impur et aurait pu le détourner. Au contraire, Jésus a non seulement guéri la femme, mais il a rétabli son lien avec Dieu. Il établit également un lien interdit avec cette femme lorsqu’il l’appelle « ma fille ».
La fille de Jaïre
Le récit très touchant de Jaïre est «inséré» dans celui de la femme souffrante d’hémorragies. Jaïre, chef élu de la synagogue locale, était également le responsable de la supervision du service religieux hebdomadaire, de la gestion de l’école et de l’entretien de l’immeuble. D’autres chefs de synagogue ont mis pression sur Jaïre pour qu’il oppose Jésus, mais Jaïre n’a pas cédé aux influences. Jaïre s’est prosterné devant Jésus et a exprimé sa détresse : « Ma petite fille est à toute extrémité. Viens lui imposer les mains pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. » Ce geste posé par Jaïre était significatif de même qu’un acte audacieux de respect et d’adoration.
L’histoire continue: « Il saisit la main de l’enfant, et il dit : “Talitha Koum”, ce qui signifie : “Jeune fille, je te le dis, lève-toi!” Aussitôt, la jeune fille se leva et se mit à marcher » (5,41-42). En disant « jeune fille », il établit avec elle le même lien que Jaïre avec sa fille.
Dans chaque cas, la sainteté de Jésus transmue l’impureté de la personne. Ainsi, l’écoulement du sang s’arrête. La femme est guérie. Le cadavre est ressuscité. La jeune fille sort de son lit. Jésus élève chaque personne à son niveau confiant à l’individu le mérite de la présence de Dieu.
Jésus, le guérisseur
Dans de nombreux récits de guérison, Jésus atteste sa puissance d’accorder la santé, la guérison, et même, la résurrection des morts. Souvenons-vous du jeune homme de Naïm (Luc 7) qui était mort. Jésus a dit, « “Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi.” Alors, le mort se redressa, s'assit et se mit à parler. » Jésus a répondu aux pleurs du lépreux qui le supplia : « Si tu le veux, tu peux me purifier. » Ému de compassion, Jésus prononça ensuite un ordre digne de Dieu et non pas d’un simple être humain : « “Je le veux, sois purifié.” À l’instant même, sa lèpre le quitta et il fut purifié. » (cf. Mc 1, 40-42) Comment pourrait-on oublier le cas du paralysé qui fut descendu d’une ouverture découverte au toit de la maison, Jésus dit, « Lève-toi, prends ton brancard, et rentre chez toi. » (cf. Mc 2, 1-12)
L’histoire de Jésus se continue dans l’Acte des apôtres lorsque l’on nous raconte que des gens « allai[en]t jusqu'à sortir les malades sur les places, en les mettant sur des lits et des brancards : ainsi, quand Pierre passerait, il toucherait l'un ou l'autre de son ombre. » (Actes 5,15) Les apôtres ont accompli ces « signes et miracles » non pas en leur propre nom, mais en celui du Christ et c'est pourquoi ils sont des signes supplétifs de sa puissance divine.
«Talitha koum»
Le récit de la fille de Jaïre nous parle non seulement de la mort d’un enfant et de la résurrection d’une fillette, mais également de la mort du cœur et de l’esprit, un mal qui afflige actuellement de nombreux jeunes. Ces mots forts porteurs de sens : « Talitha koum », jeune fille, lève-toi, s’adressent non seulement à la fillette du récit de Marc, mais également à beaucoup de jeunes, même à chacun d’entre nous. Combien de jeunes enfants vivent avec la crainte et la tristesse causés par des situations de familles désunies, de tragédies et de pertes! Combien de jeunes sont aux prises d’un cercle vicieux de la mort, c’est-à-dire les drogues, l’avortement, la pornographie, la violence, les gangs et le suicide. De nos jours, les jeunes souffrent d’angoisses, de découragements et d’autres maladies psychologiques et même physiques graves, voire de façon alarmante. Plusieurs ne savent plus ce que veut réellement dire la joie, l’amour, l’espoir et la vérité.
La tristesse, le pessimisme, le cynisme, le vide de sens, le désire prendre fin à la vie ne sont jamais des choses positives, mais de voir ou d’entendre des jeunes les transmettre nous rend d’autant plus le cœur gros et attristé. Puisque j’habite dans une grande ville comme Toronto, j’ai eu l’occasion de faire la rencontre de nombreux jeunes. Puis lorsque j’entends leur histoire de ruptures, de tristesses et de désespoirs, je me rends compte de l’énormité du travail à faire de la part des églises afin de faire revivre ces jeunes.
Actuellement, Jésus continue de ramener à la vie ces jeunes morts. Il le fait par ses mots et également, en envoyant ses disciples qui, en son nom puis son amour même, répètent aux jeunes d’aujourd’hui l’appel: «Talitha koum», «jeune homme, jeune femme, lève-toi! Revis! Aime à nouveau! Tu es aimé!»
«Alive» à Darlinghurst
En réfléchissant à l’Évangile d’aujourd’hui et ces mots forts de Jésus, « Talitha Koum », je me rappelle très bien d’un moment exceptionnel du pape Benoît XVI au cours de la Journée mondiale de la jeunesse 2008 en juillet dernier. Le Saint-Père s’est rendu à la chapelle Sacred Heart de Darlinghurst (Sydney) où il s’est entretenu avec des jeunes, ayant des antécédents de dépendance aux drogues et d’autres difficultés, qui participaient au programme «Alive». Le Pape se réfère alors aux paroles de Moïse dans l’Ancien Testament: « Je te propose de choisir entre la vie et la mort, entre la bénédiction et la malédiction. Choisis donc la vie, pour que vous viviez, toi et ta descendance, en aimant le Seigneur ton Dieu […] c’est là que se trouve la vie.
«Ce qu’ils avaient à faire était clair, » expliqua le Pape, « ils devaient se détourner des autres dieux et adorer le vrai Dieu qui s’était révélé à Moïse et ils devaient obéir à ses commandements. Vous pourriez penser qu’il est peu probable que, dans le monde d’aujourd’hui, les gens adorent d’autres dieux. Mais il arrive que les gens adorent « d’autres dieux » sans s’en rendre compte. Les faux « dieux » […] sont presque toujours liés à l’adoration de trois réalités : les biens matériels, l’amour possessif, le pouvoir. »
L’amour authentique est certainement quelque chose de bon » ajouta le Pape. « Quand nous aimons, nous devenons plus pleinement nous-mêmes, nous devenons plus pleinement humains. Mais […] Souvent, les gens pensent aimer alors qu’en réalité, ils tendent à posséder l’autre ou à le manipuler. Parfois, les gens traitent les autres comme des objets pour satisfaire leurs propres besoins. […] Comme il est facile d’être trompés par les nombreuses voix qui, dans notre société, défendent une approche permissive de la sexualité, sans prêter attention à la pudeur, au respect de soi et aux valeurs morales qui confèrent aux relations humaines leurs qualités !
Chers amis, je vois en vous des ambassadeurs de l’espérance pour tous ceux qui se trouvent dans des situations semblables. Vous pouvez les convaincre de la nécessité de choisir le chemin de la vie et de renoncer au chemin de la mort, parce que vous parlez d’expérience. Dans tous les Évangiles, ce sont ceux qui ont opéré des choix erronés qui sont particulièrement aimés de Jésus, parce que, quand ils se sont rendu compte de leur erreur, ils se sont ouverts plus que les autres à sa parole de guérison. En vérité, Jésus fut souvent critiqué par des soi-disant justes, parce qu’ils passaient trop de temps en leur compagnie. “ Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? ” demandaient-ils. Et lui répondait : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades… Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs. » (cf. Mt 9,11-13)
C’était ceux qui désiraient reconstruire leur vie qui se montraient les plus disponibles à écouter Jésus et à devenir ses disciples. Vous pouvez suivre leurs traces ; vous aussi vous pouvez vous approcher particulièrement de Jésus précisément parce que vous avez choisi de retourner à Lui. Vous pouvez être certains que, comme le père dans la parabole de l’enfant prodigue, Jésus vous accueille à bras ouverts. Il vous offre son amour inconditionnel : et c’est dans l’amitié profonde avec lui que se trouve la plénitude de la vie.
Je suis certain que Jésus fixait Benoît d’un grand sourire de même que cette rencontre formidable à Sydney ce juillet dernier. Les mots de Jésus : «Talitha koum» ont été réentendu aux antipodes alors que le pape Benoît XVI invitait les jeunes à s’élever, à revivre et à aimer de nouveau.